Les effets étonnants du festival du film de Marrakech 2013

A chaque édition du festival international du film de Marrakech les habitants de cette belle cité commencent à utiliser des ruses de sioux sur un sujet qui fâche. L'industrie très lucrative du cinéma draine des sommes pharaoniques dans le monde entier. Les stars sont grassement payées, on s'arrache les réalisateurs à la mode, on paye à prix d'or les droits d'un livre, les réalisateurs ont du talent ou pas, le livre est bon ou pas, peu importe c'est pour faire des entrées. Les producteurs demandent des miracles pour rentabiliser, bref l'argent fait son office habituel. Bien sûr on entend que crise il y a, bien sûr les intermittents sont toujours sous payés et maltraités mais globalement les bourses des gros poissons se remplissent avec régularité.

Pendant ce temps, un petit commerce insouciant se pratique au Maroc. Tous ceux qui habitent Marrakech le savent, rien de plus facile que de trouver, en avant première, un film qui ne sortira dans les salles que dans un mois. Comme il existe un fond de culpabilité et un léger désir de ne pas contrarier le monde des VIP qui va fondre sur la ville pour quelques jours, les dvd disparaissent des rues et des bacs. Il n'est pas rare de rencontrer, à cette période de l'année, dans la médina, une star quelconque qui, le sourcil froncé et la bouche pincée, déambule pour vérifier si son dernier film, non encore sorti, ne traine pas dans les ruelles ! Un peu ridicule… Que l'on se rassure, sous les jeans et les chemises, les précieux disques se dénichent assez facilement !

Mais qu'en est-il de la morale ? Comme disait notre ami Einstein « tout est relatif ». D'un côté nous avons des millions d'euros ou de dollars qui circulent et de l'autre des milliers de dirhams. Essayons de voir les choses avec un peu de cynisme et un rien d'esprit révolutionnaire. Nous avons un pays qui se débrouille pour émerger dans la ronde infernale de la finance planétaire, qui fait déjà beaucoup d'efforts par ailleurs pour y arriver, c'est reconnu et les aides internationales le prouvent, donc un petit plus n'est pas un si grand crime.

D'autre part à 10 dirhams le dvd, mon revendeur du coin de la rue n'est pas prêt de rouler en limousine grand luxe ! Il va en rester à la mobylette assez longtemps encore et il a un rôle presque humanitaire ! Il permet au plus grand nombre, qui ne dispose pas de moyens suffisants, d'accéder au 7ème art, il permet aux enfants de s'éclater avec l'âge de glace et aux plus grands de choisir entre un film de karaté ou d'Almodovar. C'est pas mal et ça peut donner envie de faire. Qui sait si un nouveau Luc Besson ne va pas naître de cette activité hautement répréhensible, parfaitement immorale et totalement condamnable !